Denis Turrier
Au début des années 1950, employeurs et salariés se sont rencontrés pour rédiger une ébauche de texte relative à la retraite et à la prévoyance, pour protéger les salariés des industries graphiques. Ainsi était né le Groupe Lourmel. Employeurs et salariés sont aujourd’hui encore solidaires dans la gestion du Groupe Lourmel, afin d’être au plus près des préoccupations des entreprises et des salariés de la profession. Le GMI donne la parole à Denis Turrier, Directeur général de Lourmel.
Vous dirigez le groupe Lourmel depuis 2006, pouvez-vous nous en dire davantage sur votre parcours professionnel ?
Après des études de droit, j’ai démarré ma carrière à la CRAM, devenue ensuite la CARSAT (Caisse d’Assurance Retraite & Santé Au Travail), pour représenter l’institution (Régime général de Sécurité sociale) devant les tribunaux et les cours d’appel de la région Rhône-Alpes : en matière de tarification des accidents du travail, de fautes inexcusables, de fraudes et de litiges divers relatif à l’Assurance vieillesse.
J’ai ensuite intégré l’Arrco (Association des Régimes Retraites Complémentaires), plus précisément son centre informatique national, pour me former et participer au contrôle des institutions de retraites complémentaires.
Dès 1989, j’ai rejoint Lourmel en qualité d’Attaché de direction puis de Responsable des services tech- niques, missions que j’ai menées jusqu’en 1994. Après un passage de quelques années dans l’indus- trie, j’ai réintégré l’Arrco pour coordonner au niveau national, la mise en place de la plateforme informa- tique « Régime unique » et veiller à son déploie- ment le 1er janvier 1999. De 2000 à 2005, après un passage dans la protection sociale du spectacle et quelques années à l’animation du réseau national de front office de l’Agirc-Arrco, j’ai pris mes fonctions de Directeur général de Lourmel en 2006, un retour à mes premières amours : l’imprimerie et les industries graphiques.
Pouvez-vous nous en dire plus sur le fonctionnement du Groupe Lourmel ?
Le fonctionnement d’un Groupe tel que le nôtre peut paraître simple vu de l’extérieur – nous collectons des cotisations et nous les reversons sous forme de prestations – cependant, entre collecte et redistribution, plusieurs réglementations doivent être mises en œuvre dans différentes branches de la protection sociale :
- la retraite est contrôlée et réglementée par l’Agirc-Arrco,
- la prévoyance, la santé et l’assurance sont contrôlées et réglementées par l’ACPR, le régulateur national des assureurs. Que ce soit pour la retraite ou l’assurance, tout est organisé en termes de gouvernance, autour d’administrateurs désignés par les organisations syndicales patronales, dont fait partie le GMI et les cinq organisations syndicales des salariés. C’est le paritarisme de gestion qui nous permet d’être au plus près des préoccupations des entreprises et des salariés de la profession.
Quel bilan dressez-vous de l’année 2020, une année « noire » sur le plan sanitaire ?
C’est en effet une année noire qui est vécue différemment par les entreprises du secteur. Il est aujourd’hui trop tôt pour tirer un bilan des conséquences de cette situation unique, sur le moyen et long terme.
L’année 2021 n’a pas commencé sous les meilleurs auspices, avec l’annulation d’un grand nombre d’événements par exemple, qui représentent un chiffre d’affaires important pour certaines entreprises. A contrario, la crise a été moins prégnante sur d’autres secteurs, tels que l’emballage.
Pour le Groupe Lourmel, ce fut un véritable électro- choc. La situation sanitaire nous a accaparés durant le premier confinement et nous avons réussi à mobiliser tout notre savoir-faire et notre expertise pour être présents auprès des entreprises et des salariés. Nos équipes se sont organisées en 72h pour mettre en place le télétravail afin d’apporter service et assistance à toutes celles et ceux qui en avaient besoin.
Notre conseil d’administration et nos collaborateurs étaient au rendez-vous pour prendre des décisions rapides, concrètes et efficaces. J’en profite pour remercier nos collaborateurs pour leur capacité d’adaptation et leur performance au travail. Ils ont été extrêmement réactifs aux situations singulières liées aux différents confinements.
Quels dispositifs d’aide et d’accompagnement avez-vous mis en place pour les chefs d’entreprise de la branche et leurs salariés, durant la crise ?
Avant cette crise, nous ne connaissions pas de problématiques d’une telle ampleur : sur la période du premier confinement de mars – avril 2020, nous avons géré l’équivalent de 50% des arrêts de travail d’une année complète.
Dès le début de la crise sanitaire et jusqu’à la fin juin, nous avons pris en charge les arrêts de travail pour garde d’enfants. Plus important, nous avons exonéré de cotisations patronales et salariales les indemnités de chômage partiel et l’éventuel complément de salaire qui était versé par les entreprises en vue de maintenir la rémunération des salariés et ce, en main- tenant le versement des prestations.
Nous avons aussi proposé des reports de cotisations et mis en place un double dispositif d’accompagnement des chefs d’entreprises et des salariés pour surmonter les difficultés rencontrées.
Dans le cadre de notre accompagnement, nous sommes restés très fidèles à la vision de nos fondateurs et avons mis en œuvre des solutions opérationnelles qui ont tissé un maximum de liens au sein des entreprises. Nous n’avons pas fait du RSE pour être tendance ! Le social et le sociétal font partie intégrante de notre culture d’entreprise.
Nous menons une mission d’intérêt général depuis des années et nous sommes un acteur clé pour les entreprises en leur apportant des solutions concrètes. Nous prenons en charge toutes les situations, accident du travail, décès, maladie de courte et de longue durée… Dans le cadre de la gestion de cette crise, nous sommes un des seuls assureurs à avoir consacré une partie de ses fonds propres pour soutenir ses adhérents. Notre Conseil d’Administration, fort de sa bonne gestion historique des fonds financiers, a choisi d’en redistribuer une partie, au moment aigu où les entreprises en ont eu le plus besoin, sans entamer la solvabilité, donc la pérennité du système actuel de paiement des prestations. C’est un effort au bénéfice de tous.
Quels conseils donneriez-vous aux dirigeants qui peinent à redémarrer l’activité de leur entreprise au cœur de cette crise sanitaire sans précédent ?
Chaque entreprise du secteur est différente et chaque dirigeant met en place sa propre stratégie en fonction de ses propres convictions. Les recettes clés en mains ne sont pas toujours les meilleures, surtout face à une crise inédite comme celle que nous traversons.
Pour Lourmel, le crédo est l’action, vers les entreprises et les adhérents, pour continuer à être à leur écoute, les aider à surmonter leurs difficultés et leur apporter des réponses concrètes. Nous resterons imaginatifs et créatifs, dans la mesure de nos contraintes réglementaires et de nos obligations financières.
Le secteur de l’imprimerie a traversé plusieurs crises depuis le début des années 90, période à laquelle j’ai rejoint ce milieu, le passage de l’offset au numérique par exemple qui a présenté de nombreuses opportunités après avoir soulevé des doutes. Gageons que l’histoire se répètera et que notre secteur se relèvera de cette nouvelle crise.
Quelle est votre stratégie de développement dans ce contexte difficile ?
Je fais partie de ces hommes qui considèrent que la société apprend toujours de son histoire. C’est une crise de plus dans le monde mais également dans le métier. L’organisation et les usages de notre société vont inévitablement évoluer. Nous avons foi dans la branche des industries graphiques et dans sa capa- cité à se relever, s’adapter, évoluer et se relever. Le Groupe Lourmel va en faire de même.
Notre stratégie de développement s’appuiera tou- jours sur les principes et les valeurs qui ont construit le Groupe Lourmel, grâce et autour de la profession de l’imprimerie : la solidarité, la proximité, la disponibilité et la créativité. C’est pourquoi, depuis quelques mois, nous proposons une offre en prévoyance et en santé aux indépendants et aux Travailleurs Non-Salariés, nombreux dans la profession et au-delà.
Il nous semble maintenant utile et pertinent de déployer notre savoir-faire, notre expérience et nos valeurs, aux professions connexes ou proches de la filière imprimerie, pour consolider leur protection sociale et celle de leurs salariés.
Quel serait votre leitmotiv ?
Je suis un optimiste, mais je m’interroge néanmoins sur les conséquences humaines, sociales et économiques de cette crise sur la société et son fonctionnement à venir. Je reste malgré tout persuadé que l’humanisme qui a prévalu à la création du Groupe Lourmel demeurera encore et toujours d’actualité. Nous entrons dans une nouvelle société qui doit se réinventer sur des valeurs issues de la vision de nos fondateurs, en restant tout simplement humain.